Bioingénieur·e, pour quoi faire ?

Enquête

L’affaire a fait grand bruit, en mai dernier. Lors de la remise de leur diplôme, huit étudiants d’AgroParisTech ont proclamé leur refus de contribuer à un système agricole productiviste et mondialisé.

Chez Tchak, on s’est demandé si les étudiants bioingénieurs belges portaient les mêmes revendications. Suite à notre appel à témoignages, nous avons découvert une frange révoltée pour qui le mot « transition » a été vidé de son sens. 

Ce que ces étudiants veulent, c’est renverser le modèle capitaliste technocentré. Ce qui les intéresse, ce sont les implications sociales et environnementales de leurs actes. Ce qu’ils exigent, c’est une formation en adéquation avec l’urgence des enjeux écologiques. 

En Fédération Wallonie-Bruxelles, un master en agroécologie a pourtant vu le jour. Mais il manque de moyens. Autre constat de notre enquête : les freins aux modifications des programmes sont multiples.

Et les (futurs) bioingénieurs ne sont pas les seuls à exprimer leur insatisfaction. Dans les facultés belges d’économie, les appels à revoir les enseignements se multiplient aussi. Sans résultat, pour l’instant. 

Bienvenue dans cet 16° enquête de Tchak. Une enquête qui souligne aussi la façon dont nos systèmes alimentaires façonnent notre économie, notre société et le monde.  Une réflexion que nous avons poursuivie lors de trois soirées débats, en mars et en mai 2023, à l’UCL, Gembloux Agro-Bio Tech (ULiège) et l’ULB.

Nos partenaires pour ces trois soirées

Notre enquête

Cinq chapitres pour décrypter ce que veulent les jeunes bioingénieur·e·s

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Les profs à côté de la fac

La « carte blanche »

Les réactions

Les freins

Le focus

L’interview

Le regard extérieur

Commentaire | Sang-Sang-Wu, journaliste

Que les étudiants évoluent plus vite et qu’ils soient plus radicaux que les institutions et les profs en place, cela n’a rien d’étonnant. Ce qui m’a par contre beaucoup plus interpellée, c’est le niveau de désillusion et de désespoir chez certains jeunes. J’ai échangé avec des gens qui, à 20 ans, m’ont parlé de dépression, de pessimisme, d’anxiété et d’angoisses à n’en pas dormir la nuit. Je sais qu’en France, le roi a sonné la fin de l’insouciance, mais si on ne peut plus être insouciant à 20 ans, alors quand est-on autorisés à l’être ?

L’idée n’est pas de tomber dans un idéalisme béat en se pâmant devant cette nouvelle génération qui serait parfaite. Les jeunes ont leurs incohérences, leurs contradictions, leurs perceptions tronquées. Parce qu’ils sont humains. Mais leur incapacité à se projeter dans le métier de bioingénieur, titre pourtant convoité, doit nous interpeller. De même que leur sentiment d’être tiraillés, écartelés entre des injonctions contradictoires. D’un côté, on leur dit que c’est la fin du monde ; de l’autre, on les enjoint à être modérés dans leur critique de la société et à étudier bien sagement les rouages d’un système mortifère en vue de décrocher une grande dis’. 

Il me semble que collectivement, il est plus que temps de faire un pas pour avancer vers une compréhension mutuelle, entre étudiants de différentes filières mais aussi entre jeunes et moins jeunes. Il s’agit d’écouter, et surtout d’entendre, ce qui m’est apparu comme un cri du cœur, un cri du corps, un cri des tripes. Pour que leur avenir ne soit pas que ténèbres. 

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