Ce commentaire est publié en préambule de notre enquête consacrée aux aspirations des étudiants bioingénieurs et agroécologues. En juillet dernier, Tchak leur lançait un appel à témoignages. Nous avons reçu une bonne cinquantaine de questionnaires en retour. Des réponses souvent assez longues, nourries, réfléchies. On a pris une claque, tant nous avons découvert une frange révoltée et désireuse de changements à la hauteur de l’urgence des enjeux écologiques actuels.
Pour que leur avenir ne soit pas que ténèbres
Commentaire | Sang-Sang-Wu, journaliste | sang-sang@tchak.be
Que les étudiants évoluent plus vite et qu’ils soient plus radicaux que les institutions et les profs en place, cela n’a rien d’étonnant. Ce qui m’a par contre beaucoup plus interpellée, c’est le niveau de désillusion et de désespoir chez certains jeunes. J’ai échangé avec des gens qui, à 20 ans, m’ont parlé de dépression, de pessimisme, d’anxiété et d’angoisses à n’en pas dormir la nuit. Je sais qu’en France, le roi a sonné la fin de l’insouciance, mais si on ne peut plus être insouciant à 20 ans, alors quand est-on autorisés à l’être ?
L’idée n’est pas de tomber dans un idéalisme béat en se pâmant devant cette nouvelle génération qui serait parfaite. Les jeunes ont leurs incohérences, leurs contradictions, leurs perceptions tronquées. Parce qu’ils sont humains. Mais leur incapacité à se projeter dans le métier de bioingénieur, titre pourtant convoité, doit nous interpeller. De même que leur sentiment d’être tiraillés, écartelés entre des injonctions contradictoires. D’un côté, on leur dit que c’est la fin du monde ; de l’autre, on les enjoint à être modérés dans leur critique de la société et à étudier bien sagement les rouages d’un système mortifère en vue de décrocher une grande dis’.
Il me semble que collectivement, il est plus que temps de faire un pas pour avancer vers une compréhension mutuelle, entre étudiants de différentes filières mais aussi entre jeunes et moins jeunes. Il s’agit d’écouter, et surtout d’entendre, ce qui m’est apparu comme un cri du cœur, un cri du corps, un cri des tripes. Pour que leur avenir ne soit pas que ténèbres.
Une enquête en cinq chapitres
Notre enquête «Les profs à côté de la fac !» est à la une du 12° numéro de Tchak (hiver 22-23). Elle donne la parole aux étudiants, aux professeurs, aux autorités facultaires. Elle comporte cinq chapitres :
1. Témoignages : les étudiants déplorent des cours trop centrés sur l’aspect technique et le productivisme.
2. Analyse : les freins qui bloquent l’évolution des cursus.
3. Focus : master en agroécologie, une filière sans véritable soutien.
4. Interview : « Beaucoup de profs n’ont pas fait de mutation mentale ».
5. Regard : la fronde s’étend également aux facs d’économie.
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