Quand on regarde leur emballage, les soupes en boîte ont tout pour séduire : le côté sain, durable et artisanal est mis en avant. Un marketing bien pensé, mais pas vraiment crédible. Beaucoup d’image mais peu de consistance.
Regard signé par Renaud Debruyn, pour Ecoconso | rdebruyn@ecoconso.be
Le Belge serait le troisième plus gros mangeur de soupe en Europe. C’est un repas de choix pour l’hiver, qui réchauffe quand on rentre du boulot ou d’une balade, et une bonne façon de manger des légumes.
Pas envie ou le temps d’en préparer avec des légumes frais ? Plus de potage maison au congélateur ? Pas de problème : l’industrie agroalimentaire propose un large choix de soupes qu’il suffit de réchauffer.
Si les soupes fraîches gagnent du terrain (+ 12,7% de croissance entre 2018 et 2019 pour les soupes fraîches, selon Gondola), la brique reste importante, rapidité et facilité oblige. Son emballage a d’ailleurs tout pour plaire. Mais peut-on lui faire confiance ?
1. Des « labels » de qualité aux critères vagues
Avec Liebig, Knorr est la marque la plus répandue. On trouve dans sa gamme plusieurs potages avec des « légumes issus de l’agriculture durable, cultivés en plein air ». On imagine que c’est en opposition aux légumes cultivés sous serre.
Cette mention est accompagnée de ce qui ressemble à un label de qualité. Rien de bio toutefois. Sur leur site, beaucoup de communication, d’images et de « petites histoires » mais peu de données sonnantes et trébuchantes. On ne sait pas quelles productions sont concernées, quels sont les critères du cahier des charges ni qui, à part Unilever (la multinationale), vérifie leur respect. On n’a même aucune idée de l’origine des ingrédients. Ces légumes « durables » pourraient autant être belges que venir de l’autre bout de la planète.
À noter que Knorr a également une gamme de potages bio. Ils portent aussi la mention « agriculture durable », pour ajouter à la confusion.
2. Des mentions floues
D’autres informations ornent les emballages : « Saveurs d’Antan », « Recettes de grand-mère », « naturellement sans conservateurs (ou colorants) ». Autant de mentions qui sont là pour vanter le côté traditionnel, sain et durable du produit. On doute cependant que la moindre grand-mère ait été impliquée.
+ Un exemple de la communication mensongère de Knorr (Foodwatch)
En fait, ces mentions floues ne sont pas encadrées légalement. Il n’y a que le terme «artisanal » qui est défini par un ensemble de lignes directrices. Et encore, ce n’est pas une loi. [1]Seule certitude : on ne peut pas mentir au consommateur. Donc des mentions comme « sans conservateur » ou « sans exhausteur de goût » ne sont pas obligatoires mais si elles sont présentes, le produit doit s’y conformer.
3. Et les ingrédients dans tout ça ?
Pour un potage, l’important est d’être riche en légumes. Les soupes en briques en contiennent des quantités variables : de 7% pour un velouté d’asperges à 65% pour un potage tomate. Le reste c’est essentiellement… de l’eau. Voire des pommes de terre et de l’amidon de maïs, qui donnent de la texture. Et coûtent moins cher.
Heureusement, les ingrédients problématiques comme les exhausteurs de goût ou les arômes se font rares dans les listes d’ingrédients.
4. Beaucoup de sel
Le tableau nutritionnel, obligatoire sur l’emballage, renseigne la teneur en sel. On y apprend qu’une portion de potage apporte plus de 30% du sel recommandé par jour pour un adulte-moyen. Et qu’est-ce qu’une portion ? C’est le fabricant qui décide. Dans cet exemple, elle est de 250 ml. Soit moins de deux louches. C’est énorme. Eh oui, le sel, ça donne du goût. Pour compenser des légumes qui n’en ont pas assez ?
5. Prix et déchets : on paie la facilité
On prépare une soupe maison, même bio, pour moins de 1,5 € du litre. Alors qu’un potage en brique coûte facilement 3,5 € du litre au supermarché. Parfois moins, souvent plus : entre 2,5 et plus de 4€ /litre (prix relevés en nov. 2019).
Côté déchets, même constat. Une soupe maison ne génère quasiment que des déchets compostables. Alors que la brique de soupe atterrit à la poubelle. Certes, elle ne pèse pas lourd (+/- 30g) et se met au tri sélectif. Mais son recyclage est limité car les TetraPak sont des emballages multimatières. Il faut séparer les couches et seule celle en papier est recyclée, les autres (plastique et aluminium) sont souvent incinérées.
6. En conclusion
Si on s’arrête à la composition, non. Mais il ne faut pas prendre ces soupes pour autre chose que ce qu’elles sont : des produits industriels, sans identité environnementale, locale, sociale ou éthique, faits à partir d’ingrédients dont on ne sait pas grand-chose.
Leur prix est élevé par rapport à du fait maison mais quand on pense à toute la chaîne de production et de distribution qu’il y a derrière une brique de soupe, on se demande comment ce n’est pas encore plus cher.
Finalement, beaucoup d’image, de marketing, mais peu de consistance.
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