Face à une boîte d’œufs de la « Ferme Pessleux », qui se doute que cette ferme… n’existe pas ? L’Inspection économique vient de mettre fin à ce marketing trompeur. Mais le dossier illustre combien les références au caractère fermier d’un produit sont galvaudées par les industriels. Côté défense des producteurs, la riposte traîne : jusqu’ici, tous les labels fermiers lancés par la Région wallonne ont été des flops.
Clémence Dumont – Journaliste / clemence@tchak.be
En théorie, en Belgique, il interdit de vendre un produit présenté de manière trompeuse. Si l’Inspection économique, qui fait partie du Service public fédéral Économie, considère qu’une étiquette est mensongère, elle peut ouvrir un dossier et, le cas échéant, le transmettre à la justice. Mais où se situe la frontière entre une ferme et une usine ? Et un artisan qui transforme la matière première de son voisin sans être lui-même exploitant agricole, peut-il décrire son produit comme fermier ? Faute de définition légale de cette mention, le flou domine.
+++ Ce sujet est au sommaire du numéro 2 de Tchak, en vente dès le 6 juillet.
Même quand la tromperie est évidente, encore faut-il une plainte pour la faire cesser. Or il suffit d’arpenter les allées d’un supermarché pour se rendre compte que cette menace est peu dissuasive.
Une illustration parmi d’autres. Depuis 2011, les établissements Frédéric Pessleux commercialisent des œufs sous la marque « Ferme Pessleux » dans des enseignes comme Carrefour Market, Proxy Delhaize et Match. Ce grossiste en produits alimentaires n’est manifestement pas une ferme. Pourtant, il a pu déposer le nom d’une marque qui fait croire le contraire auprès de l’Office Benelux de la propriété intellectuelle. Office qui n’a pas détecté la supercherie.
Interrogé sur ce cas, le SPF Économie nous a appris que l’Inspection économique venait de clôturer un dossier à la suite duquel la société a changé sa dénomination commerciale en « Philippe Pessleux » (*). Mais cela ne l’aura donc pas empêché de berner les acheteurs pendant 9 ans.
« Les producteurs qui se sentaient lésés n’osaient pas dénoncer ce cas car ils avaient peur des représailles des magasins, avec lesquels ils négocient directement », souligne le coordinateur du Collège des producteurs, l’organisme qui a fini par déposer plainte. De plus, l’Inspection économique a commencé par se déclarer incompétente parce que le nom de la marque était déposé.
En bout de procédure, le parquet de Namur affirme ne pas avoir été saisi du dossier, contrairement à ce qu’indique le SPF Économie. L’entreprise échappe donc à une sanction. Une nouvelle fois. En 2019, le tribunal de l’entreprise avait dû lui ordonner de cesser de commercialiser des œufs « omégas 3 » dont les valeurs nutritives alléguées étaient mensongères. La justice pénale s’était alors contentée de classer le dossier sans suite, constatant que l’infraction n’avait pas perduré.
(*) Rectificatif (6 juillet) : les oeufs des établissements Frédéric Pessleux sont désormais étiquetés « Philippe Pessleux », et non « Frédéric Pessleux » comme nous l’avait indiqué par erreur le SPF Economie. Un nom sous lequel l’entreprise commercialise également du « beurre de campagne ».
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J’ai 81 ans, j’ai connu les oeufs et le beurre de Mr Crespeigne, puis de son beau fils Philippe Pessleux, j’ai toujours acheté les oeufs et le beurre « Pessleux » et je les trouve meilleurs ….
Et fairebel au marketing trompeur vous en parlez.?