Voici mon secret. Il est très simple : on ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiiel est invisible pour les yeux. »
Le renard, dans Le Petit Prince, Antoine de Saint-Exupéry
Édito | Yves Raisière, journaliste, rédac-chef
Invisible. Ce qui est hors de portée de notre vue. Ce qui ne tombe pas sous nos sens. Ce qui est dérobé, caché ou perdu. Plus insidieux : celui qui ne veut pas être vu, celui qui agit dans l’ombre… Une définition, des mots, des nuances au cœur de la ligne éditoriale de Tchak, la revue paysanne et citoyenne qui tranche. Si le pire est déjà sous nos yeux et mérite d’être décrypté, l’essentiel doit encore être mis en lumière, raconté et incarné.
+ Cet édito est publié en quatrième de couverture du numéro 15 de Tchak (automne 2023).
L’essentiel, c’est ce besoin primaire de s’alimenter, indispensable à la vie depuis la nuit des temps. S’alimenter, sainement et durablement. Une base qui nous permet de vivre en bonne santé longtemps ; et qui, surtout, fait de nous des êtres humains, pas de simples consommateurs et consommatrices. Le savoir n’empêche pourtant pas l’inertie, quand bien même nous sommes assis sur une bombe aux multiples détonateurs.
Tenez : s’il y a une molécule qui pourrait mettre le feu aux poudres, c’est l’amidon, dont nous parlons dans ce numéro. Au fil du temps, ce glucide complexe est devenu l’un des ingrédients clés de l’industrie agroalimentaire. Un filon qui permet de masquer l’essentiel : la prolifération des produits composés de calories vides. Fibres, vitamines et sels minéraux y sont échangés contre des additifs, du sucre et du sel. Un grand remplacement — bien réel celui-là — qui mine comme jamais les caisses de l’assurance-maladie, au seul profit de quelques actionnaires.
De l’alimentation ultra-transformée à l’alimentation low cost, il n’y a qu’un pas. Depuis les années 80, seule compte l’addition, pourvu qu’elle soit le plus bas possible. Ce matraquage a façonné notre cerveau, au point là aussi de fausser l’essentiel : un référentiel à un prix juste, une façon équitable de concevoir les échanges commerciaux ou encore l’importance de respecter notre environnement. Les générations futures le payeront en milliards, peut-être même en guerres.
Comment éviter l’explosion ? Peut-être en prenant conscience que se nourrir est bien plus qu’un besoin vital. Ce sont des sensations, des émotions, du plaisir partagé ; de la solidarité avec le monde paysan, avec des personnes en situation de précarité, avec d’autres régions. C’est aussi reconstruire des territoires et de la démocratie directe.
Deux exemples parmi d’autres dans ce numéro. À Ciney, Marie-Claire Wylock a réussi à reconnecter sa ferme à tout un écosystème. À Saint-Pierreville, la coopérative Ardelaine est parvenue à remettre son village sur la carte de France. Des contes presque philosophiques qui révèlent l’essentiel : pour avoir une chance d’éteindre la mèche, mieux vaut regarder avec le cœur.
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Tchak s’adresse aux mangeur·euse·s qui veulent se reconnecter avec le monde paysan. Tous les trois mois, 112 pages sur les dessous de notre alimentation.
Au sommaire de nos numéros, des enquêtes, des décryptages, des reportages sur un monde au coeur de la transition, de la société, de l’environnement, de l’économie et de la santé publique. Un travail journalistique qualitatif qui demande beaucoup de moyens et de temps.
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