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La confiance, ça ne se décrète pas

Confiance sans borne, aveugle, absolue… Pléonasmes. Décider de croire en une personne revient, de toute façon, à prendre le risque de se faire mordre. Comment, dès lors, se prémunir de la trahison ? Quelle est la limite entre la foi et la crédulité ? Mieux vaut signer des alliances, répond l’Histoire. Le consumérisme et Darty ont, eux, créé le contrat de confiance. Sans garantie dans aucun des cas.      

Édito | Yves Raisiere, journaliste

Prenez, par exemple, le développement exponentiel des boîtes-repas, au sommaire de notre nouveau numéro (automne 2022). HelloFresh, Foodbag, Simply You Box… D’une marque à l’autre, même service : quelques clics, et le jour dit, vous recevez vos ingrédients. Engagement tenu, certes. Mais quid de la solidarité promise avec les paysans, du respect de l’environnement ? Là, bonjour le double discours, même si, heureusement,  d’autres entreprises ont la langue moins fourchue.    

Autre exemple avec notre décryptage sur les promos « 1 + 1 gratuit ». Festival dans les rayons de la grande distribution, qui s’affiche en défenseuse de consommateurs de plus en plus précarisés. Derrière la façade, le prétendu rapport de confiance se mue pourtant en rapport de force. Premiers à devoir financer l’imposture : les agriculteurs alors qu’ils sont eux-mêmes aux abois. Comme quoi, un serpent qui change de peau est toujours un serpent. 

Puisqu’on parle salaire, Tchak a fait l’addition. Avec l’inflation et la hausse des prix de l’énergie, la morsure est terrible. En Belgique, près de 650.000 personnes ont recours à l’aide alimentaire. Énorme. Une vulnérabilité qui traduit, cette fois, la rupture de contrat entre le monde politique et la société. Aux avant-postes, pourtant, la Fédération des services sociaux plaide pour la mise en place de chèques repas sociaux, et le Réseau wallon de lutte contre la pauvreté pour une sécurité sociale de l’alimentation.

En attendant, le doute, venin insidieux, se propage de plus en plus en profondeur. Solitude, burn-out, dépression. Taux de confiance inverse à l’indice de croissance. Comment croire des courbes qui laissent autant de gens en ordonnée  ? Tout le système doit évoluer, mais quel infini embrasser ? En Wallonie, coopératives et associations misent sur la vigne comme compas de cohésion sociale. Un terreau fertile pour réapprendre la confiance en soi, en les autres, en l’avenir, comme le souligne notre enquête.  

On le voit, la confiance ne se décrète pas. Et c’est tant mieux. Elle résulte d’un credo qui se tisse au fil d’une rencontre, d’un dialogue. Et somme toute, d’un saut dans le vide. Portrait aux Arondes et au Chant des Cailles. Deux fermes partagées qui naviguent entre autonomie et mutualisation, deux histoires qui soulignent combien, au bord de la falaise, l’aventure est belle quand on s’abandonne à la bienveillance des autres.